Villa L’Ubayette (Barcelonnette)
Commande isolée faite à l’architecte parisien Georges Debrie, associé à l’ingénieur Georges Pierron, L’Ubayette est achevée en 1903. Construite le long de l’allée des Dames, pour Henri Proal, ancien négociant à Mexico, la villa tranche singulièrement sur les constructions contemporaines par une sobriété confinant à la sévérité et par sa ressemblance avec une multitude de pavillons de la banlieue parisienne.

Ici, l’originalité réside dans l’exaltation d’un matériau unique, la pierre. L’Ubayette est ainsi la seule villa à utiliser la pierre pour le gros œuvre, les modénatures et l’ornementation, renonçant à tout autre élément décoratif, souvent rencontré dans la vallée, tel que céramique, menuiserie, vitrail ou ferronnerie. La mise en œuvre différenciée de la pierre, brute, lisse, taillée, rustique, accentue le caractère indépendant de cette architecture dont la sévérité est renforcée par l’étroitesse des fenêtres et qui paraît ainsi vouloir lutter contre le climat rigoureux de la montagne.

Le choix exclusif de la pierre et sa mise en œuvre pourraient être une tentative prérégionaliste faite par un architecte extérieur à la région, informé de la théorie sur la vérité rationaliste dans l’architecture.

Alors que les cheminées ouvragées ornant l’intérieur des villas sont exécutées en marbre, plus rarement en onyx, selon un procédé de fabrication en série, la grande cheminée de la salle à manger de L’Ubayette est une œuvre unique, réalisée en noyer.
Monumentale, la cheminée adossée occupe toute la hauteur du mur jusqu’au plafond, à la façon des cheminées médiévales.

Deux colonnes corinthiennes cannelées forment les piédroits, soutenant un manteau fortement mouluré. La hotte, ornée d’un masque grotesque et de pots à feu, est couronnée par un dais d’inspiration gothique.

Pour cette réalisation particulièrement ambitieuse l’artiste, qui reste à identifier, n’a pas hésité à mélanger les styles : dais gothique, piédroits et manteau Renaissance, décor maniériste de la hotte et classique de l’ouverture du foyer, du repousse-braises et des chenets en cuivre. Cette cheminée est un bel exemple du langage éclectique qui marque aussi le mobilier et le décor intérieur, contrastant fortement avec la sévérité de l’architecture extérieure.

La villa abrite depuis 1978 les services de la sous-préfecture de Barcelonnette.