Villa Bleue (Barcelonnette) 98040368va
Les " barcelonnettes " au Mexique Les villas Les architectes et les maîtres-verriers Annexes
Larchitecture extérieure
Lespace du vestibule
La vitrerie
Dernier chantier de lentre-deux-guerres, la villa Bleue édifiée en 1931 à Barcelonnette, pour Camille Jean, fondateur de la Francia Maritima à Mexico, occupe la grande parcelle laissée libre sur lélégante avenue Porfirio Diaz, lotie entre 1905 et 1913. Limposante construction clôt de façon spectaculaire une période de 50 ans darchitecture de villégiature dans la vallée.
Cette ambitieuse villa rassemble la brillante association darchitectes et dartistes décorateurs réunie en 1925 à lexposition internationale des Arts Décoratifs à Paris, sous la direction de larchitecte Joseph Hiriart.
Photo : 02040049xa attention : recadrer, voir photocopie
Larchitecture extérieure
La villa Bleue, comporte deux étages au-dessus dun rez-de-chaussée surélevé de caves et de pièces de service. Elle est couverte dun imposant toit brisé en pavillon abritant deux étages de comble. Le dessin de chaque élévation est symétrique ; les élévations est et ouest sont traitées avec sobriété, les façades nord et sud, particulièrement ambitieuses, soulignent limportance emphatique du programme.
Photo : 98040368va
Si le programme architectural et décoratif de la villa Bleue nignore pas totalement la grammaire du langage moderniste contemporain, comme en témoignent les fenêtres en bande, le jeu de formes orthogonales, la disparition de la modénature et de lornementation, elle est encore influencée par le " style paquebot " alors en vogue et crée la surprise par son attachement à un certain pittoresque formel.
Ainsi lintense jeu de polychromie qui habille les façades et les accès nord et sud, en rupture totale avec la blancheur absolue des constructions modernistes, surprend et tranche avec la rigueur plastique du volume intérieur. Photo : 98040376xa
Le jeu polychrome distingue encore létonnante couverture brisée, exécutée de façon incongrue, et pour la première fois dans le paysage urbain de Barcelonnette, en tuile mécanique colorée.
Enfin, le maintien de la toiture classique en pavillon et la hauteur démesurée du brisis viennent ajouter au caractère pittoresque de la villa.
Louverture démultipliée sur le site distingue la façade sud, qui associe étroitement fenêtres, balcons et loggias. Un avant-corps entièrement percé selon un rythme ternaire marque laxe de cette façade qui cherche à capter la lumière.
On notera le clin dil formel avant-gardiste des bacs à fleurs intégrés à lescalier qui adoptent un style géométrique perceptible depuis la loggia, faisant songer au traitement du jardin cubiste de la villa Noailles à Hyères. Photo : 98040386xa
La villa Bleue est inscrite à lInventaire supplémentaire des Monuments Historiques depuis le 10 mars 1987.
Lespace du vestibule
Lespace intérieur sarticule autour dun vaste hall central de plan carré englobant les deux étages et éclairé par une verrière zénithale composée dun damier de 49 carrés orange et blancs.
Un escalier tournant suspendu à deux volées droites dessert laccès à la galerie du premier étage, soutenue par deux piliers en béton armé habillés de marbre, qui encadrent la verrière de la porte dentrée percée dans laxe de lélévation nord. Photo : 98040337xa
Lélégante ferronnerie de la rampe dappui de lescalier, réalisée par le ferronnier Schwartz (présent au Mexique dans la construction des grands magasins), adopte un parti de transparence. Le dessin figure un motif stylisé de vagues qui rappelle singulièrement celui des ferronneries du théâtre des Champs-Élysées construit à Paris par les frères Perret entre 1911 et 1913. photo : 98040345xa
Au sol, une mosaïque dessine sur toute la surface un énorme soleil sur fond dondulations disposées en diagonale, mêlées à une multitude de cercles colorés. On ne connaît pas lauteur de cette composition qui se dévoile complètement depuis la galerie à létage ; peut-être sagit-il du mosaïste Cazaux, associé à larchitecte Hiriart pour dautres commandes ?
Il nest peut-être pas aventureux den attribuer le dessin à larchitecte, le mosaïste ne se chargeant alors que de lexécution. Photo : 98040339xa
galerie du premier étage
Traitée avec emphase et une certaine sévérité, la distribution intérieure marque une rupture avec lespace domestique privé traditionnel et renvoie clairement à un espace commun de prestige rappelant celui des hôtels et châteaux des XVIIe et XVIIIe siècles et qui nest peut-être pas sans réminiscence avec les grands halls à langlaise de Godbarge au pays basque que Joseph Hiriart devait connaître.
La galerie suspendue de létage, revêtue de mosaïques (reprise du décor du rez-de-chaussée) et protégée par le même garde-corps en ferronnerie (reprise du motif de celui de lescalier) met en scène et donne accès aux cinq chambres tout en permettant de jouir du grand vide central traité tout en transparence.
La distribution et le décor des chambres évoquent directement ceux des cabines des grands paquebots de luxe contemporains, à la pointe de la modernité, signés des plus grands noms. Placée en partie haute, une série de hublots y fait clairement référence. Ils constituent en outre une source déclairage supplémentaire pour le couloir périphérique de létage de comble qui abrite trois autres chambres situées au sud.
Photo : 98040351xa
La vitrerie
La grande séduction du hall central réside encore dans le traitement tout en transparence du rez-de-chaussée qui abrite les espaces de réception au sud et distribue les indispensables pièces de service au nord.
Afin de bénéficier de la belle luminosité offerte par la création dun grand jardin dhiver placé au sud, entre le salon et la salle à manger, Joseph Hiriart choisit de bannir tout cloisonnement aveugle au profit dune structure vitrée légère et translucide, matérialisée par une série de portes en verre gravé à lacide ornés de motifs végétaux.
Photos : 98040329xa et 98040334xa
Les portes vitrées latérales, complétées par un jeu de miroir, ainsi que la grande verrière qui englobe laccès principal à la villa, contribuent à leur tour au dilatement de lespace et à la diffusion de la lumière, véritable enjeu de ce très ambitieux programme architectural.
grande verrière
La longue et fructueuse complicité de Jacques Gruber avec Joseph Hiriart conduit pour la seconde fois le peintre-verrier à Barcelonnette.
Le thème traité par Gruber à la demande dHiriart, est lié à lIndustrie et au Progrès, thèmes nouveaux révélés à lexposition des Arts Décoratifs de 1925 et souvent traités par Jacques Gruber.
Dans un saisissant raccourci imagé, limposante verrière (2 m x 8 m) célèbre la réussite de tous les entrepreneurs barcelonnettes dans lindustrie textile et le négoce.
Au premier plan, au-dessus de la porte, sont représentés les métiers à tisser, puis les fabriques et leurs hautes cheminées en activité, enfin la silhouette emblématique du grand magasin de nouveauté (La Francia Maritima à Mexico, propriété du commanditaire). En arrière-plan figure une chaîne de montagne qui fait plutôt songer à la silhouette voisine du Chapeau de Gendarme plutôt quau Popocatépetl.
Une composition abstraite, marquée par lutilisation quasi exclusive du verre blanc, introduit par Gruber dès 1922, sert de premier plan à cette vaste fresque figurative, fondée sur une écriture géométrique en résonance avec nombre de recherches plastiques contemporaines.
Pour ce paysage industriel inédit, Jacques Gruber utilise en grande quantité le verre américain, verre industriel coulé à reliefs, (chenillé, plissé, maroquiné
), quil affectionne particulièrement. La matière variée du verre américain qui laisse passer la lumière et la réfléchit permet au vitrail dêtre regardé sur les deux faces. Le soir, éclairée de lintérieur, la grande verrière, exécutée dans un camaïeu de tons froids bleus et violets, acquiert une dimension matérielle et devient " un épiderme sensible ".
Photo : 98040320va